L’Île Saint Denis est une petite commune du 93. Sur une partie de l’île devrait atterrir une partie du futur « Village des Athlètes », nommée sympathiquement « écoquartier fluvial de l’Île Saint Denis », sous maîtrise d’ouvrage de la SEM-Plaine Commune Développement. Nous partageons dans cet article des points d’alertes ou d’inquiétudes issues d’observations menées par la vigie citoyenne Île Saint Denis.
Sur l’île St-Denis plusieurs années de chantiers doivent aboutir à :
- 22 hectares (soit 28 terrains de foot:) aménagés sur une ancienne friche
- 300 logements familiaux dont 90 logements sociaux et 26 en Accession sociale – CAPS
- 126 studios étudiants + un restaurant
- un hôtel Accord Hôtel de 135 chambres
- une base nautique + un restaurant géré par la fondation Léo Lagrange
- une Cité des Arts gérée par le 6B, Sinny & Ooko et Legendre XP
- un immeuble de 8 étages de bureaux (10 000 m²) destiné à l’économie dite « fluviale ».
- un petit parc public de 1,5 hectares, sous une autoroute (la fameuse A86)
Les petites et grandes sources d’inquiétude identifiées pour le moment
Nous vous invitons à participer à toutes les recherches et documentations qui vous tiennent à cœur, afin de préciser et étayer nos recherches, rendez vous sur notre forum.
- Une densification subite inappropriée :Si l’Ecoquartier Fluvial-EQF aurait été de toute façon construit, avec ou sans les JOP, cela accélère sa construction et ne présage aucunes garanties quant à l’attribution du label définitif d’écoquartier, 3 ans après sa livraison (2026 et 2029).
La maîtrise d’ouvrage par Plaine Commune, alors que le reste du Village des Athlètes est sous MO Solideo, met un peu « à part » le mode consultatif (absent) et la communication des chantiers. La charte de la SEM Plaine Commune promet un prix de vente en 2026 maîtrisé à 3500€/m² alors que c’est déjà le prix de l’ancien en 2020 et que le neuf se vend à plus de 4000€.
Comme partout, c’est une densification d’un bloc, sur un territoire déjà saturé : les routes, la mairie et les services ne peuvent déjà pas faire face aux besoins actuels de la ville (poste, CCAS, écoles, médecins, commerces, services jeunesse et sports, police, circulations et stationnement…). Pourtant, les élus locaux se félicitent d’accueillir 1000 habitants et 500 travailleurs ou visiteurs en plus.
Dans quelles conditions ?
- L’augmentation des inégalités urbaines :
Pourquoi continuer de saccager nos territoires en agglutinant des gens sans accompagner et faciliter le vivre ensemble ? La phase 1 de l’EQF, déjà livrée, révèle bien des déceptions pour ses habitants : quartier isolé, entre-soi, stigmatisation et cambriolages, géothermie représentant un coût trop important pour les ménages, rejet des logements sociaux, malfaçons des bâtiments, ilôts de chaleur, problèmes de stationnement…
Tous les bâtiments ont déposé des recours contre leur promoteur. Et pourtant, il faudra construire encore plus vite ceux de 2024 !
Les bâtiments seront d’une densité inappropriée à l’île, très serrés, de 30m de haut faisant disparaître le lien à la Seine, à l’horizon.
Ils sont construits de plus en plus proche de l’autoroute 86, exposés aux microparticules et nuisances sonores. Le mur anti-bruit n’étant pas prévu sur la Seine, le couloir de bruit, ni sur le versant Nord de l’A86.
Qui ira vraiment faire un pique-nique ou jouer avec ses enfants dans un parc sous une autoroute ?
Ces transformations très rapides vont vraisemblablement augmenter les tensions sociales déjà visibles entre les quartiers.
La solution que propose la ville, outre le fait d’orienter les nouveaux habitants vers Pleyel et St-Ouen, est la vidéo-surveillance, qui sera accrue pendant la phase JOP et doublée de sociétés privées de sécurité, de drônes et probablement de reconnaissance faciale pendant les jeux.
Est-ce que ces Jeux Olympiques et Paralympique seront vraiment bénéfiques pour notre jeunesse ?
On sait déjà que les promesses de création d’emploi sont à nuancer fortement.
Le département est déjà très touché par le trafic de drogue et la prostitution, on sait que les JO viennent accentuer ces phénomènes : quel accélérateur d’Histoire voulons nous ?
- Un héritage incertain:
Cela laissera en héritage des lieux publics gérés par des sociétés/fondations privées : Cité des Arts, base nautique. On attend de connaître les conditions de locations et d’abonnements et espérons que les habitants pourront y accéder gratuitement et librement. On regrette aussi que les milliards des JOP ne permettent toujours pas l’aménagement d’une piste cyclable pour les 2/3 de la ville, alors qu’elle en prévoit une nouvelle qui reliera l’Ecoquartier Fluvial au centre-ville, à St-Ouen et Pleyel. On ne pourra toujours pas se rendre au collège ou au Parc Départemental à vélo en sécurité.
On a déjà relevé des conflits d’intérêts des marchés publics : les entreprises ESS proches du maire sont partenaires des JOP, le promoteur Legendre Construction est mécène du Festival de St Denis, Dubrac BTP directeur de Plaine Commune Entreprise et de l’Office de tourisme, sa femme directrice du syndic SabImmo qui gère l’écoquartier fluvial Phase 1 et présidente de la Chambre du Commerce et de l’Industrie 93…
- L’altération des milieux vivants de nombreuses espèces :
L’île est située en plein couloir migratoire, entourée par le fleuve et proche des zones de conservation « Natura 2000 ». Dans cette zone où les écosystèmes sont déjà malmenés par l’urbanisation, les friches de végétations spontanées abritaient des espèces dont certaines protégées : hérisson d’Europe, martin pécheur, héron cendré, grand cormoran, pipistrelles. Le rapport de Risques effectué par la Solidéo les mentionne correctement.
Mais qu’importe…
Plusieurs hauts immeubles entièrement vitrés sont prévus (et un déjà livré), les vitres sans teinte ou sérigraphies sont des pièges sur lesquelles les oiseaux s’écrasent. (cf ASPAS).
Quant aux arbres presque centenaires, ils sont considérés comme des poteaux, contraignant l’urbanisation. Ce sont 10 platanes historiques des berges, classé au Plan Canopée départemental 2020 comme « alignement remarquable » qui sont abattus sur 100m pour faire passer une passerelle piéton-bus de 16m afin d’aller prendre le métro à Pleyel en 2026 (et de permettre aux athlètes d’aller à leur cantine). Principal argument de vente des logements : « à 15 minutes de Pleyel ». La rue centrale de l’EQF est trop étroite pour la croissance de grands arbres, refuge de la biodiversité, ce seront donc des essences gardées « mini » qui seront plantées, créant une ombre de piètre qualité et perpétuant les îlots de chaleurs déjà présent dans l’EQF, et puis… la vue sur Seine vaut plus cher que des arbres qui la cache.
Le fleuve est traité comme un simple « objet » dont on pourrait disposer, au mépris de la vie des écosystèmes des fonds de rivières, point de départ de la biodiversité tant chérie dans les discours. Malgré les promesses des Voies Navigables de France (VNF) les poissons risquent une asphyxie lors des travaux de dragage visant à élargir le chenal de navigation du petit bras de Seine (pour permettre le croisement des barges sur toute la longueur de l’île). Le raclage de 15 000 m3 de boues sédimentaires est annoncé pour avril-novembre 2022, soit en pleine période de ponte, sans que rien ne soit précisé quant au traitement des sédiments pollués (seront-ils juste déversés ailleurs ?).
On pointe aussi le risque de fragilisation des berges non empierrées (quai du Moulin et parc Départemental), le déplacement de quelques bateaux-logements qui habitaient les bords du fleuve et une belle dose de techno-surveillance : contrôle de la navigation par vidéosurveillance et drone (annoncée par VNF).
Un « compostage » des gravats de béton pour « nourrir la terre ». C’est bien ce qui est annoncé : les gravats de béton seront réduits en poussière pour ensuite être réintégrés dans des sols et digérés. Bonne nouvelle ? Cela pourrait constituer une expérience intéressante si le volume de béton à digérer était approprié aux 9 mois annoncés, les champignons risquent l’indigestion ! Il n’existe aucune expérience au long court qui permettent de s’assurer que la végétation future se plaira dans ces terres ainsi nourries. Est-ce vraiment la solution zéro-carbone adéquate ? Combien d’énergie dépensée pour réduire du béton en poussière « digérable » plutôt que le recyclage habituel des gravats dans du béton de construction ?
Pourquoi avoir mise en attente la terre de surface végétale, sous bâches, plutôt que de régénérer sur place, durant 4 ans, les futures terres du parc urbain ?
D’autant que la Solidéo est prudente et annonce, si l’expérience ne fonctionne pas, de ramener de la terre végétale.. mais par voie navigable, impact zéro-carbone oblige !
Si l’EQF représente le point le plus haut de l’île (+31m), une interrogation survient tout de même à la vue de RDC pleins, contraignant les éventuelles futures montées et retrait des eaux.
Les dalles fondatrices ont été calculées à partir de la hauteur de crue de 1910 (+28,6m), là où plusieurs spécialistes concordent à dire que la crue centennale sera plus haute qu’en 1910 du fait de l’urbanisation et ce, malgré les bassins de rétention en amont de Paris.
Dans tous les cas, c’est bien le cadre de vie de tous les habitants qui va être altéré par cette densification subie et subite dans un territoire saturé et de logements et services ne répondant pas vraiment aux besoins de la majorité des habitants actuels.
On aurait pu espérer d’une ville écologiste qu’elle propose de nouvelles manières, sociale et écologique, de « produire la ville ».
En février 2021 :
-aucun visuel ni concertation publique sur le parc paysager sous l’A86, agence Volga.
-Aucun visuel ni concertation publique sur l’aménagement des berges de l’île, agence Volga.
-Projet de la passerelle non communiqué clairement
-Projet de la centrale de mobilité n°2 non communiqué clairement
A CREUSER : On continue la veille !
N’hésitez pas à écrire au collectif « Vigie Île Saint Denis » ou à saccage 2024 pour partager d’autres informations sur les sujets qui vous intéressent
– la notion de « rentable a subventionner en architecture », et autre enquête sur les architectures prévues (quels coûts à long terme ? quid des structures en bois ? est-ce encore des bâtiments à « obsolescence programmée » qui seront moins chers à détruire qu’à rénover ?)
– la poursuite de l’urbanisation au nord de l’A86, après les JO, communiquée sur internet (EQF Philippon et Kalt), la mairie s’était pourtant engagée à ne plus urbaniser.
– les emplois dans l’ESS, qui ont la part belle dans les emplois créés : on espère qu’ils vont durer !
– … etc.
Le Flyer du collectif « Vigilance citoyenne de l’Île Saint Denis » :
Pour suivre ceux et celles qui se mobilisent :
La Vigie Citoyenne de l’Île Saint-Denis, par mail, ou sur le Forum !