Les JOP 2024 : chronique d’un durcissement annoncé

Comme les dossiers de candidature aux JO sont des fictions bonnes à survendre l’évènement, tout ce qui a été promis est trahi et toutes les trahisons se réalisent. Point d’étape sur une escroquerie par une petite mise-à-jour des données les plus scandaleuses disponibles sur les JO en ce début 2024 – rassurez-vous, la réalité sera pire.

Point d’étape en ce début 2024

Le budget

Vendu et survendu comme étant sobre, mince et dans les rails, tout indique qu’il est en train d’exploser, comme à chaque édition. Certes, nous n’atteignons pas les chiffres stratosphériques de la Chine, de la Russie ou du Japon, mais le gouvernement engage la France sur une pente dangereuse, sans l’avouer.

Plusieurs données mettent la puce à l’oreille.

Au point de départ, le budget public était censé se « limiter » à un peu plus d’un milliards d’euros. Or, le Parlement a voté, lors du projet de loi de finances 2022, une garantie de 3 milliards d’euros au Cojop. Donc, cela veut dire que cette somme est largement atteignable, ce qu’a confirmé devant le Sénat le président de la Cour des comptes le 10/01/2023, après « prise en compte des dépenses fiscales, des dépenses de sécurité, sanitaires, de transports »… Actuellement ce coût est de « 2,4 milliards d’euros (1,3 md EUR pour l’État et 1,1 md EUR pour les collectivités locales », selon lui.

Par ailleurs, un article du Monde confirme le « dérapage » financier pour le JO 2024.

Ainsi, la Cour des comptes qui ne manque pourtant jamais de faire connaître son attachement à la « réussite des Jeux » s’impatiente de n’être toujours pas « en mesure d’évaluer le coût global » des Jeux olympiques et paralympiques (JOP) et de « l’impact final » qu’ils auront sur les finances publiques en général, Etat et collectivités territoriales confondus. « La Cour réitère sa recommandation visant à ce que, au-delà de la maquette financière de la Solideo [Société de livraison des ouvrages olympiques, la société chargée de la construction des sites olympiques] et du budget du Cojop [le Comité d’organisation des Jeux olympiques et paralympiques], l’ensemble des coûts en investissement et en fonctionnement engagés pour les Jeux et à l’occasion des Jeux soient consolidés »,dans son rapport.

Le simple fait que la sécurité ne soit pas incluse dans cette recension officielle montre que le budget initial, déjà officiellement dépassé, le sera encore davantage puisque, au bas mot, la sécurité se chiffrera au minimum à un milliard d’euros. En effet, les JO de Londres ont déjà pratiquement atteint ce chiffre. Vue la situation actuelle et la fantaisie de la France d’organiser une cérémonie d’ouverture spectaculaire et mobilisant des forces de sécurité considérables, il n’y a aucune raison que ce soit moins.

Par ailleurs, relevons dans les chiffres officiels un certain nombres d’approximations et d’absences. Ainsi, la « santé » n’est pas prise en compte ou simplement dans le cadre du budget « Impact 2024″ qui comprend  » des projets en faveur du bien-être et de la santé, de la réussite éducative et citoyenne, ainsi que de l’inclusion, la solidarité et l’égalité par le sport. » Étonnement, le gouvernement oublie la loi olympique n°2 qui dans ses articles 1 à 5 créé un centre médical avec imagerie médicale et nucléaire à l’usage des participants (athlètes et autres membres de délégations) entièrement gratuit, financé par la sécurité sociale, charge finale pour l’État. Les médicaments seront aussi fournis. Les personnels médicaux et para-médicaux des équipes sont autorisés à exercer. Tout cela se fera directement aux frais de l’État.

Rien n’est dit non plus sur les dépassements budgétaires concernant les infrastructures de transports imputées au budget du Grand Paris. Ces dépassements sont expliqués par une accélération des travaux pour terminer en 2024. Le plus grand flou règne là-dessus. On serait sur un surcoût global de 7 milliards du budget du Grand Paris pour l’instant sans qu’à aucun moment celui découlant des chantiers directement liés aux JO ne soit officiellement précisé par la société du Grand Paris. En général, quand c’est flou, c’est qu’il y a un loup. Il faut s’attendre à plusieurs milliards qui ont vocation à être absorbés par l’argent public, d’une manière ou d’une autre.

Quelques approximations : le gouvernement donne les dépenses d’État stricto sensu (et donc pas toutes), pas celles d’autres organismes publics qui concourent au financement des JO. Ainsi les Olympiades culturelles (par exemple), c’est 31,9 millions, pas 20. Il est vrai qu’on n’est pas à 12 millions près quand il s’agit d’argent public.

En somme, les paris sont ouverts concernant le dépassement. Plus d’un milliard, c’est certain, mais le doublement du budget est possible. Rappelons que la récente loi étrillant les chômeurs et chômeuses a été faite pour économiser sur leur dos 2 milliards et que le pays a été malmené pour une réforme des retraites qui racle 2 milliards par an sur les ayants-droits.

La légende de JOP socialement inclusifs a fait long feu.

Le prix des places a explosé : en dépit d’un système au demeurant assez complexe de quota de places abordables, il faudra débourser 200 euros pour les meilleures places des qualifications de la gymnastique rythmique et jusqu’à 690 euros lors des sessions d’athlétisme.

Les meilleures places lors de la cérémonie d’ouverture coûtent 2700 euros, la moins chère 250 euros (inutile de se précipiter sur celles-ci, il n’y en a plus et de toutes façons, ce sont des places debout). Pour les jeux paralympiques, c’est moins cher : de 450 à 700 euros seulement.

Concernant le coût des hôtels, l’UfC Que Choisir constate qu’il atteint « 1 033 euros, prix moyen pratiqué pour la nuit du 26 au 27 juillet 2024»

Les étudiants qui verront leur logement Crous réquisitionné durant les Jeux olympiques de Paris recevront une indemnité de « 100 euros » et « deux places » offertes pour assister à des « épreuves olympiques », a annoncé la ministre de l’enseignement supérieur, Sylvie Retailleau, jeudi 26 octobre. A l’occasion des Jeux olympiques de Paris, plus de 2 000 étudiants vont, en effet, devoir être relogés, car leur logement Crous, organisme qui gère notamment les résidences étudiantes, sera réquisitionné pour loger les pompiers, soignants, forces de l’ordre et de la sécurité civile.

Concernant le coût du passage de la Flamme olympique, il est de 180 000 euros pour la collectivité locale concernée. Ce chiffre a entraîné un certain nombre de refus : les Vosges, la Meurthe-et-Moselle, l’Indre-et-Loire, le Lot-et-Garonne, la Creuse, la Haute-Loire et la Haute-Vienne, la Loire-Atlantique, les Côtes-d’Armor et l’Orne n’en veulent pas à cause du chèque demandé par les organisateurs.

Enfin, le ticket de métro double (passant à 4€ le ticket pendant les Jeux), et le PassNavigo à 70€, la promesse initiale étant celle de la gratuité des transports en commun pendant les JO, essentiellement au nom de l’écologie.

Toujours pour illustrer le caractère socialement inclusif des JO, certains n’hésitent pas à parler de nettoyage social  à l’approche des JO : intensification du harcèlement policier contre les SDF et migrants entre les stations de métro La Chapelle et République avec des pratiques brutales de destructions d’habitats précaires ou de gazages pour les rendre inutilisables. Par ailleurs, la préfecture de Paris a annoncé que certaines « zones rouges » autour des sites olympiques ne seraient pas accessibles à la circulation des personnes sans-abri pendant les JO – le parc de La Villette en fait partie où se réfugient des personnes sans abri.

Plus de 3000 places d’hôtel sociaux ont fermés au cours de l’année en prévision de l’accueil des touristes pendant les JO. En avril dernier, le squat Unibéton, où vivaient 500 personnes sur l’Île-Saint-Denis a été détruit pour devenir un lieu de construction du village olympique. Deux autres squats de sans-papiers ont été expulsés cet été.

Pour héberger celles et ceux qui sont expulsés des campements ou des squats, une dizaine de centres d’accueil temporaires ont été ouverts dans plusieurs régions françaises depuis le mois d’avril 2023. Les migrants sont envoyés trois semaines en région pour que leur situation soit évaluée. S’ils ne répondent pas aux critères de demandes d’asile, ils retournent à la rue. Jusqu’ici, 1 600 migrants ont été évacués de Paris vers d’autres régions, selon le ministère du logement, par le biais des « Sas d’accueil régionaux ». En province, les migrants, trop pauvres, trop colorés, seront moins visibles et agaceront moins l’œil du touriste énamouré d’exploits olympiques.

La sécurité

Concernant la sécurité, nous avons déjà donné les éléments de la loi olympiques n°2 qui est une loi de sécurité globale prévoyant le développement de la vidéosurveillance algorithmique (VSA) par l’installation de cette quincaillerie à de nombreux endroits ainsi que leur embarquement possible sur drones, eux-mêmes par ailleurs généralisés pour la surveillance d’événements publics depuis peu. Nous avons déjà indiqué en quoi la VSA est un pas de plus de la surveillance de l’espace public, des comportements individuels et collectifs et qu’elle préfigure la reconnaissance faciale. Le déploiement « à titre expérimental » de cette technologie ne trompe par ailleurs que celles et ceux qui veulent l’être.Voir nos camarades de La Quadrature du Net

Par ailleurs, l’AFP a confirmé de 23 octobre 2023 la militarisation de l’espace public, apanage de toutes les éditions JO, par l’annonce du gouverneur militaire de Paris de 15000 militaires pour l’évènement.

Quelque 5.000 d’entre eux seront logés sous des tentes en plein Paris, sur la pelouse de Reuilly, pendant la durée des Jeux olympiques.

Ces nombres annoncés ne tiennent pas compte d’une éventuelle défaillance du côté de la sécurité privée, un secteur d’activité dont les difficultés font craindre au Comité d’organisation (Cojo) et à l’État de ne pas pouvoir réunir assez d’agents privés. Pour la seule sécurisation des sites de compétition, qui relève de la responsabilité du Cojo, il faut entre 17.000 et 22.000 agents de sécurité.

Dans une lettre écrite par le préfet d’Île-de-France au ministre des Transports en décembre 2023, celui-ci écrit : « À certains endroits, le plan de transport ne permet d’acheminer les spectateurs que si tous les autres voyageurs ou presque étaient dissuadés de prendre le métro, le RER ou le bus ».

D’ores et déjà, certaines entreprises envisagent la fermeture et le chômage technique pour la période des JO, car il sera quasiment impossible d’accéder à certaines zones de la capitale. Quant au Gouvernement, il encourage tous les Franciliens à reprendre le chemin du télétravail ou des vacances.

 

À chaque édition des JO on constate un gaspillage d’argent public accompagné de mensonges  visant à masquer la politique du fait accompli, un mépris social éhonté allant de pair avec un recul des libertés publiques et d’atteintes graves aux droits fondamentaux, un nettoyage social marquant un pas de plus dans la guerre que mènent au long cours les pouvoirs publics contre les migrants et les plus pauvres. L’édition des JO 2024 à Paris confirme que, pas plus que dans aucun autre domaine, il n’y a pas d’exception française.

 

Annexe

 

[VIDEO] POURQUOI ON DÉTESTE LES JOP ? – #0 INTRO

SÉRIE DE VIDÉO : POURQUOI ON DÉTESTE LES JOP ? »

Il y a tellement de raison de les détester, ces jeux olympiques.

Toutes les semaines, le Lundi une vidéo de moins de 10 minutes qui vous expliquera un sujet précis en lien avec les JOP : la surveillance, les expulsions, l’économie, l’écologie et j’en passe…

On doit arrêter les saccages sociaux, économiques, démocratiques et écologiques que déclenchent les jeux. On doit arrêter ce projet absurde de faire les jeux d’hivers 2030 dans les Alpes.

On doit arrêter le projet absurde des jeux olympiques tout court. On doit éteindre la flamme. On ne veux pas de JOP, ni ici, ni ailleurs.

Présentation Publique à Saint denis

On continue la rentrée le 11 janvier à la Librairie Bourlinguer à St denis !
C’est une rencontre conjointe avec le Chiffon, le journal de Paname et sa banlieue, qui vient de sortir un hors-série sur les JOP.
L’objectif de cette rencontre à Saint-Denis, lieu phare des JOP 2024, est de proposer une autre analyse des JOP, que nous considérons comme destructeurs à tous les niveaux : économique, social, écologique mais aussi sécuritaire.
On vous attend nombreux et nombreuses !

Actions du 6 janvier : Présentation à la BAM

Pour bien commencer cette rentrée anti-olympique et dans le cadre de l’appel à action de No Jo on se retrouve des le 6 janvier à la BAM pour une rencontre autour du thème des Jeux d’hiver : Alpes 2030 / Milan 2026

Entrée libre, participation libre – buffet en auberge espagnole (on apporte, on partage)

Pour préparer cette rencontre, vous pouvez consulter nos brochures sur le sujet :

Alpes 2030 : https://saccage2024.noblogs.org/files/2023/12/JOP-Alpes-2030-page-a-page.pdf

Milan 2026 : https://saccage2024.noblogs.org/files/2023/12/Comite-des-Jeux-olympiques-non-durables.pdf

Grenoble 68 : https://saccage2024.noblogs.org/files/2021/07/Grenoble68_pages-1.pdf

Albertville 92 : https://saccage2024.noblogs.org/files/2021/07/Albertville92_pages.pdf

6 Janvier : Actions contre les JOP des Alpes 2030

À l’initiative du collectif No Jo, faisons du 6 janvier une journée de mobilisations national contre les JOP et particulièrement contre la candidature des Alpes, qui vient d’être retenue pour les Jeux d’Hiver 2030.

Chausser vos plus belles combis, vos plus grands skis et retrouvons-nous sur les ronds points ! Tracter, discuter, agissez pour montrer qu’encore une fois ces JOP n’ont rien de populaires !

Vous pouvez retrouver l’évènement ici : https://www.facebook.com/events/3623580857892802

Réunion Publique – Novembre

La prochaine réunion publique de Saccage 2024 aura lieu le 24 octobre à 19h.
La réunion aura lieu a la Bourse du travail de Saint-Denis, en salle Victor Griffuelhes

C’est une réunion d’accueil et de présentation du collectif, mais aussi de présentation et d’échange avec le collectif « Revers de la Medaille ».
Enfin en dernière partie de réunion on travaillera en petits groupes sur des mobilisations en cours.

 

 

Les journalistes ou étudiant.es en travail, qui viennent pour faire un papier, ou nous étudier ne sont pas bienvenu de ce cadre de « réunion ».
D’autre moments sont plus propices. (manif, rassemblement, soirée de soutient, soirée de lancement, présentation débat etc.

02/12: 1er journée de mobilisations contre les ravages des Jeux Olympiques et Paralympiques

Journée de mobilisations contre les ravages des Jeux Olympiques et Paralympiques.

Faisons du 2 décembre une journée de mobilisations contre les ravages des JOP partout sur nos territoires !
Disons « non » aux JOP d’Hiver 2030 et visibilisons les ravages en cours des JOP 2024 !

Le 1 décembre, la candidature « Alpes 2030 » pourrait devenir réalité. Soyons inventifs et inventives, sortons nos pique-niques, nos casserolades, nos banderoles ! Faisons de la musique, du sport, de l’art, bloquons les sponsors : bref, tout ce que nous trouverons pertinent !

Envoyer à l’adresse : appelsjop@disroot.org Un titre, Une heure et un lieu pour l’action, suffisamment précis pour qu’on puisse vous retrouver.
Après l’action, même si elle n’a pas été annoncée, envoyez-nous des photos et petits textes pour que nous puissions les relayer.

Retrouvez toutes les actions sur : mobilisations-jop.fr.eu.org

Notre tribune dans Le Monde: Nous réclamons un référendum sur la candidature des Alpes françaises aux Jeux olympiques d’hiver 2030

Trouvez ci-dessous notre tribune intégrale publier dans Le Monde le 12 octobre 2023.

——————————

Si les régions Auvergne-Rhône-Alpes et Provence-Alpes-Côte d’Azur ont officialisé leur candidature aux Jeux d’hiver 2030, c’est parce que les autres ont refusé, explique un collectif d’organisations et de particuliers dans une tribune au « Monde », qui questionne leur légitimité dans un contexte de réchauffement climatique.

—————-

La France est en train de devenir la sauveuse du mouvement olympique : sans attendre le succès ou l’échec des Jeux olympiques et paralympiques (JOP) 2024 dans la capitale, les régions Auvergne-Rhône-Alpes et Provence-Alpes-Côte d’Azur ont officialisé leur candidature aux Jeux d’hiver 2030.

Si un comité national olympique se retrouve dans la situation de peaufiner le dossier de leur candidature aux Jeux olympiques d’hiver en préparant les Jeux d’été imminents – un cas rarissime –, c’est parce que le Comité international olympique (CIO) ne peut pas trouver d’hôte fiable ailleurs.

L’industrie du ski dans les Pyrénées espagnoles a brièvement soutenu la candidature des Pyrénées-Barcelone, mais les opposants ont mobilisé cinq mille manifestants le 15 mai 2022, avec le slogan « Per un Pirineu Viu, Aturem els JJOO d’hivern ! » (« Pour des Pyrénées vivantes. Arrêtons les Jeux olympiques d’hiver »). Le mois suivant, l’Espagne a abandonné sa candidature. Vancouver (Canada), ville hôte en 2010, a montré son intérêt, mais le gouvernement de Colombie-Britannique a refusé de dépenser des milliards de dollars pour deux semaines de sport.

Après des abandons successifs devenus coutumiers désormais, le CIO comptait sur une ville japonaise, Sapporo, mais les critiques contre le mouvement olympique y sont très fortes, à cause notamment d’un scandale de corruption autour des Jeux de Tokyo. Il a été donc obligé de modifier le délai normal, à savoir l’attribution des Jeux sept ans avant, pour gagner du temps.

C’est dans ce contexte qu’un membre français du CIO, Guy Drut, a proposé une candidature commune des deux régions alpines de la France. Les deux présidents desdites régions, Laurent Wauquiez et Renaud Muselier, se sont mis d’accord et ils ont rencontré le président du CIO, Thomas Bach, le 7 septembre.

Donc, si la France organise les JOP d’hiver 2030, c’est parce que les autres ont refusé. C’était exactement pour la même raison que Paris a eu ses Jeux d’été. Pendant la candidature de Paris, la population n’a jamais été consultée. Or, à l’époque, quelques voix ont réclamé un référendum, à l’instar de Hambourg (Allemagne), une autre ville candidate aux JOP 2024, où les habitants ont exprimé leur rejet avec 51,7 % des votes « Nein ».

Sept ans plus tard, nous nous sentons obligés de reprendre la même démarche. Nous réclamons un référendum autour de la candidature des Alpes françaises aux JOP d’hiver 2030.

Nous croyons que cette demande est légitime. Non seulement parce que nous avons désormais découvert, avec Paris 2024, l’ampleur des impacts que les Jeux peuvent produire sur nos espaces verts, nos libertés publiques et nos droits sociaux. Mais aussi parce que c’est le CIO qui a évoqué lui-même la possibilité d’un référendum systématique.

Par rapport à l’accumulation des « non » dans les villes où un vote a été tenu (Munich, Davos, Cracovie, Hambourg, Calgary et Sion), John Coates, le vice-président du CIO, a dit en 2018 : « Pour les pays où le référendum est en vigueur, cette question doit être réglée avant de se présenter comme candidat auprès du CIO (…). Ce n’est pas quelque chose de plaisant, nous voulons désormais éviter cela. » C’est ainsi que le CIO essaie d’imposer que les villes ou les régions organisent un référendum avant de candidater.

Mais nous n’avons pas à accepter que l’imposition d’un référendum préalable se traduise par l’interdiction d’un référendum postérieur au lancement dans la course, d’autant plus que les populations ne sont nullement consultées sur la candidature en amont, et que la discussion entre le CIO et les élus français a commencé très discrètement en coulisses, sans écho médiatique.

Plus fondamentalement, nous ne croyons pas que le CIO ait le droit de dicter la vie publique d’un pays. Nous souhaitons avoir un débat public sérieux sur ce point aussi. De quel droit en effet une organisation non gouvernementale suisse peut-elle imposer ses règles aux Etats souverains ?

Nous voudrions aussi questionner la légitimité des Jeux d’hiver dans le contexte du réchauffement climatique. Depuis un certain temps, plusieurs études scientifiques pointent la non-durabilité des Jeux d’hiver. L’une des plus récentes, publiée dans la revue Current Issues in Tourism en janvier 2022, a montré qu’une seule ville, parmi les anciens hôtes, serait encore capable d’accueillir les JOP d’hiver à la fin du siècle, sans réduction drastique des émissions de gaz à effet de serre : Sapporo.

Si nous continuons à réchauffer la planète avec nos vieilles pratiques, comme d’organiser des événements polluants et non essentiels à grand renfort de neige artificielle, et si les Japonais n’acceptent pas que leur ville devienne le site permanent des Jeux d’hiver, ceux-ci devront cesser d’exister tôt ou tard.

Les Jeux d’hiver sont à la fois victimes et accélérateurs du réchauffement climatique. Plus la planète se réchauffe, plus la neige se raréfie, et plus les Jeux deviennent dépendants d’un ersatz polluant.

Cependant, dans un entretien accordé au quotidien Le Parisien, le président du Comité national olympique et sportif français (CNOSF), David Lappartient, a fait preuve d’un ultracrépidarianisme [l’art de parler de ce que l’on ne connaît pas] exemplaire, en affirmant avec aplomb : « Oui, on aura de la neige ». Dans la tribune publiée par Le Dauphiné libéré, les élus des Alpes du Sud déclarent : « Les Jeux, c’est l’opportunité de donner un second souffle à nos infrastructures, à notre aménagement, à nos hébergements touristiques et permanents », tandis que Laurent Wauquiez promet les « premiers JO d’hiver durables ».

Le référendum serait une occasion d’aborder leurs arguments. Car enfin : est-ce que la vertu économique des Jeux d’hiver est toujours d’actualité ? Est-ce un modèle économique à défendre ? Voulons-nous vraiment de nouvelles pistes de bobsleigh ? Et des tremplins de saut à ski ? Leur ratio utilité/carbone est-il convenable ?

Ces enjeux doivent faire l’objet d’un vrai débat public. Il est légitime et urgent de réclamer que les populations soient informées loyalement, pour qu’elles puissent décider.

Retrouvez la liste complète des signataires ici.